Grand entretien



  

  
  


  
   "En Afghanistan, on ne punit pas les femmes, on les détruit"
Grand entretien "En Afghanistan, on ne punit pas les femmes, on les détruit"

Grand entretien "En Afghanistan, on ne punit pas les femmes, on les détruit"

Lapidations, interdiction d’étudier, défense de fréquenter les parcs publics… Depuis le retour au pouvoir des talibans, l’Afghanistan est considéré par l’ONU comme “le pays le plus répressif” au monde pour les femmes. Chaque jour, leurs droits se réduisent un peu plus. Dans le documentaire Afghanes, diffusé dimanche 12 mars sur France 5, la réalisatrice Solène Chalvon-Fioriti donne la parole à quatre générations de femmes. La journaliste, façonnée par ses onze années passées dans le pays, revient pour franceinfo sur le quotidien sous emprise des Afghanes.

Franceinfo : Cela a-t-il été simple d’interviewer ces femmes ?

Solène Chalvon-Fioriti : De manière générale, c’est plutôt difficile. Mais en ce qui me concerne cela a été plutôt simple, car ce sont des femmes que j’avais déjà rencontrées au gré d’autres reportages. Je me suis naturellement tournée vers elles lorsque j’ai décidé de faire ce documentaire, car je souhaitais qu’il soit intime et que l’on puisse se voir dans leurs lieux de vie. Surtout, j’ai choisi qu’il n’y ait pas d’hommes dans le film. Le seul homme que l’on voit est le juge taliban, que j’ai été forcée de garder au montage, car sans lui, on ne pouvait pas comprendre la séquence. Mais je voulais 75 minutes de voix féminines, sans hommes qui leur soufflent ce qu’il faut dire, ce qui se fait couramment en Afghanistan. Je ne voulais pas d’homme dans mon équipe de tournage non plus.

Ces femmes peuvent-elles parler librement sans l’accord d’un homme ?

Non. J’étais obligée de demander aux patriarches, lorsqu’il y en avait, leur accord, car je ne souhaitais pas qu’elles payent le fait de me parler. En général, s’il y a un homme dans la famille, je ne prends jamais le risque en Afghanistan, sous prétexte que je suis féministe et émancipée, de faire parler des femmes en tendant simplement un micro. Cela peut être très risqué pour elles. Je préviens toujours que je vais venir, mais je demande en revanche d’être seule avec les femmes que j’interroge. Mais il y a des familles dans lesquelles il n’y a plus d’homme, c’est alors plus simple de les interroger.

Pour ce film, j’ai également fait le choix de ne pas aller vers des femmes menacées, comme auraient pu l’être des femmes politiques, des juges, des policières… Dans ces cas-là, j’aurais dû cacher des visages.

“Je ne voulais pas flouter ces visages. Je souhaitais que l’on voie leurs expressions, leur regard. J’ai choisi des femmes moins exposées qui pourraient parler librement, sans avoir peur.”

Solène Chalvon-Fioriti, réalisatrice d'”Afghanes”

à franceinfo

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